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à sa famille, et que ses habits, même les meilleurs, étaient très-avariés par l’escalade continuelle et le manque d’entretien, il se commanda à Dives, où il avait fait quelques apparitions, un habillement tout neuf, un peu de linge et de bonnes chaussures. Il paya tout très-honnêtement, et, son bâton à la main, son argent en poche, il se dirigea sur Trouville, où il rencontra son oncle tout en larmes, revenant de l’église. Il venait d’enterrer sa femme, et, bien qu’elle l’eût rendu aussi malheureux qu’il lui avait été possible, le pauvre homme la pleurait comme si c’eût été un ange. Il fut bien étonné de revoir Clopinet, qu’il croyait retourné chez ses parents, et qu’il hésitait à reconnaître, tant il était changé. Sans s’en apercevoir, Clopinet avait grandi, il avait le teint hâlé que donne l’air de la mer ; à force de grimper et d’agir, il avait pris de la force, sa jambe faible était devenue aussi bonne que l’autre, il ne boitait plus du tout. Sa figure aussi avait pris un autre air, un regard vif, pénétrant, une expression assurée et sérieuse. Ses habits, mieux faits que ceux que Tire-à-gauche fabriquait de routine aux paysans, lui donnaient aussi meilleure tournure et meilleure mine que par le passé. Laquille en fut frappé tout de suite.

— D’où sors-tu, s’écria-t-il, tu ne viens pas de chez tes parents ?

— Non, dit Clopinet, mais donnez-moi vitement de leurs nouvelles ; nous parlerons de moi après.

— Je ne puis t’en donner, répliqua l’oncle ; quand