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Ce jour-là, par le trou pratiqué dans le vieux pan de mur au flanc de la falaise et qu’il appela sa fenêtre, il se rassasia de regarder la mer. Il la trouva plus belle qu’il ne l’avait encore vue. Il contempla au loin des embarcations de différentes grandeurs ; aucune n’approchait des Vaches Noires, l’endroit était réputé dangereux. Aujourd’hui on y va de tous côtés recueillir des moules. Dans ce temps-là, la côte était déserte, on n’y voyait pas une âme. Cette grande solitude l’enhardit. Vers le soir, il alla ramasser des coquillages sur la grève pour son souper et il regarda bien si du dehors on pouvait voir sa fenêtre. Cela était impossible ; elle était trop haute, trop petite, le mur était trop bien caché par la végétation. Il ne put la retrouver avec ses yeux. Cette nuit-là, il dormit bien tranquille. Il avait tant marché, tant grimpé pour connaître tous les recoins du désert qu’il n’eut aucun besoin d’être bercé. Si les lutins s’amusèrent à crier et à parler comme la veille, il ne les entendit pas.

Le troisième jour fut employé à explorer le bas de la dune, afin d’avoir là une bonne cachette en cas de surprise sur la plage. Il en trouva dix pour une, et, tout étant ainsi arrangé et prévu, il se sentit aussi libre qu’un petit animal sauvage qui connaît son lieu de promenade et son terrier. Il pensa aussi à faire sa provision de coquillages pour avoir de quoi déjeuner ou dîner dans sa grotte, s’il ne lui plaisait pas de redescendre pour chaque repas à la mer. Il y avait beaucoup de joncs sur la côte, des genêts, des saules nains, des arbustes flexibles ; il en emporta