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Il conduisit Clopinet chez divers patrons de barque, qui, le voyant boiter, le refusèrent. Il en fut de même quand il le présenta aux hommes chargés de recruter pour la marine du roi. Le pauvre Clopinet rentra bien humilié au logis de son oncle, et celui-ci fut forcé d’avouer à sa femme qu’ils n’avaient réussi à rien, parce que l’enfant avait, une jambe faible, et que, n’ayant pas été élevé au bord de la mer, il n’avait pas non plus la mine hardie et la tournure leste qui conviennent à un marin.

— j’en étais bien sûre, répondit madame Laquille. Il n’est bon à rien, pas même à faire un lourdaud de paysan. Tu as eu grand tort de t’en charger, tu ne fais que des sottises quand je ne suis pas là. Il faut le conduire au tailleur ou à ses parents. J’ai assez d’enfants comme ça et ne me soucie point d’un inutile de plus à la maison.

— Patience, ma femme ! répondit Laquille. Il est possible que quelqu’un veuille de lui pour aller à la pêche de la morue.

Madame Laquille haussa les épaules. Le village regorgeait d’enfants déjà dressés à la pêche, et personne ne voudrait de celui-ci qui ne savait rien et n’intéressait personne. Laquille s’obstina à essayer dès le lendemain, mais il échoua. Tout le monde avait plus d’enfants que d’ouvrage à leur donner. Madame Laquille s’écria que, pour son compte, elle en avait trop et n’entendait pas en nourrir un de plus. Laquille lui demanda de prendre patience encore quelques jours et mena Clopinet à la pêche. Ce fut un grand plaisir pour l’enfant, qui oublia tous ses cha-