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et, en même-temps, elle essaya la peinture sans rien dire à personne. Elle s’était fait prêter de bons tableaux et elle copiait tous les matins pendant deux heures. Elle suivait avec attention le travail de son père qui faisait toujours, de temps en temps, pour les églises, des vierges grasses avec la bouche en cœur, mais qui, à force de manier la brosse, avait acquis beaucoup d’habileté. Elle vit ce qu’il faisait et ce qu’il ne faisait pas. Elle profita de ses qualités et de ses défauts.

Et un beau jour elle essaya de peindre le portrait, elle copia des enfants et créa des anges. Un autre beau jour, plus tard, on s’aperçut qu’elle faisait de la peinture très-belle et très-bonne, et sa réputation s’étendit très-loin. Madame Laure sentit que cette belle fille, si détestée et si patiente, était une poule aux œufs d’or et qu’il ne fallait pas la tuer. Elle s’apaisa, se soumit, fit mine de la chérir, et, à défaut de la vraie tendresse dont son cœur n’était point pourvu, elle lui témoigna du respect et des égards ; elle se résigna à ne plus la maudire, à se trouver fort heureuse, à ne manquer de rien, pas même d’un certain superflu, car Diane se privait très-volontiers d’une robe pour lui en donner une plus belle ; enfin à ne plus tourmenter le bon Flochardet qui, grâce à sa fille, redevint aussi sage et aussi heureux qu’au temps de sa première femme.

Un jour, Diane vit arriver la vicomtesse de Pictordu qui, après mille caresses et autant de circonlocutions, se résigna à lui demander si elle avait pu tirer quelque parti de ses médailles. Elle avouait que