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rapports que j’ai dû avoir avec elle. Toute chose est un élément de transformation. La plus grossière a encore sa vitalité latente dont les sourdes pulsations appellent la lumière et le mouvement : l’homme désire, l’animal et la plante aspirent, le minéral attend. Mais, pour me soustraire aux questions embarrassantes que vous m’adressez, je vais choisir une de mes existences que je me retrace le mieux, et vous dire comment j’ai vécu, c’est-à-dire agi et pensé la dernière fois que j’ai été chien. Ne vous attendez pas à des aventures dramatiques, à des sauvetages miraculeux ; chaque animal a son caractère que je vais vous communiquer.

On apporta les flambeaux, on renvoya les domestiques, on fit silence, et l’étrange narrateur parla ainsi :

— J’étais un joli petit bouledogue, un ratier de pure race. Je me rappelle ni ma mère, dont je fus séparé très jeune, ni la cruelle opération qui trancha ma queue et effila mes oreilles. On me trouva beau ainsi mutilé, et de bonne