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cette harmonie ; mais, quand on quitte les régions tempérées et qu’on se trouve en face d’une nature exubérante, le goût change, les yeux s’attachent à d’autres lignes, l’esprit se reporte à un ordre de création antérieure plus grandiose, et le côté fruste de cette création ne choque plus nos regards et nos pensées. L’Indien, noir, petit, grêle, ne donne pas l’idée d’un roi de la création. L’Anglais, rouge et massif, paraît là plus imposant que chez lui ; mais l’un et l’autre, qu’ils aient pour cadre une cabane de roseaux ou un palais de marbre, sont encore effacés comme de vulgaires détails dans l’ensemble du tableau que présente la nature environnante. Le sens artiste éprouve le besoin de formes supérieures à celles de l’homme, et il se sent pris de respect pour les êtres capables de se développer fièrement sous cet ardent soleil qui étiole la race humaine. Là où les roches sont formidables, les végétaux effrayants d’aspect, les déserts inaccessibles, le pouvoir humain perd son prestige, et le monstre surgit à nos yeux comme la suprême combinaison harmonique d’un monde prodigieux. Les anciens