Page:Sand - Consuelo - 1856 - tome 3.djvu/398

Cette page a été validée par deux contributeurs.
388
consuelo.

pelain n’en était pas dupe. Enfin, le comte Christian, retrouvant un de ces moments de fermeté tranquille et de logique simple et humaine avec lesquelles, après bien des irrésolutions et des faiblesses, il avait toujours tranché toutes les contestations domestiques, termina le différend.

« Monsieur le chapelain, dit-il, il n’y a point de loi ecclésiastique qui vous défende expressément de marier une catholique à un schismatique. L’Église tolère ces mariages. Prenez donc Consuelo pour orthodoxe et mon fils pour hérétique, et mariez-les sur l’heure. La confession et les fiançailles ne sont que de précepte, vous le savez, et certains cas d’urgence peuvent en dispenser. Il peut résulter de ce mariage une révolution favorable dans l’état d’Albert, et quand il sera guéri nous songerons à le convertir. »

Le chapelain n’avait jamais résisté à la volonté du vieux Christian ; c’était pour lui, dans les cas de conscience, un arbitre supérieur au pape. Il ne restait plus qu’à convaincre Consuelo. Albert seul y songea, et l’attirant près de lui, il réussit, sans le secours de personne, à enlacer de ses bras desséchés, devenus légers comme des roseaux, le cou de sa bien-aimée.

« Consuelo, lui dit-il, je lis dans ton âme, à cette heure ; tu voudrais donner ta vie pour ranimer la mienne : cela n’est plus possible ; mais tu peux, par un simple acte de ta volonté, sauver ma vie éternelle. Je vais te quitter pour un peu de temps, et puis je reviendrai sur la terre, par la manifestation d’une nouvelle naissance. J’y reviendrai maudit et désespéré, si tu m’abandonnes maintenant, à ma dernière heure. Tu sais, les crimes de Jean Ziska ne sont point assez expiés ; et toi seule, toi ma sœur Wanda, peux accomplir l’acte de ma purification en cette phase de ma vie. Nous