Neïsse, je lui dépêcherai quatre hommes très-habiles et très-déterminés…
— Je vous le défends : vous prendrez au contraire des informations sur le compte de cet homme ; et si sa famille a été victime de la guerre, comme il semblait l’indiquer dans ses paroles décousues, vous veillerez à ce qu’il lui soit compté une somme de mille reichsthalers, et vous le ferez désigner aux recruteurs de la Silésie, pour qu’on le laisse à jamais tranquille. Vous m’entendez ? Il s’appelle Karl ; il est très-grand, il est Bohémien, il est au service du comte Hoditz : c’en est assez pour qu’il soit facile de le retrouver, et de s’informer de son nom de famille et de sa position.
— Votre Majesté sera obéie.
— Je l’espère bien ! Que pensez-vous de ce professeur de musique ?
— Maître Porpora ? Il m’a semblé sot, suffisant et d’une humeur très-fâcheuse.
— Et moi je vous dis que c’est un homme supérieur dans son art, rempli d’esprit et d’une ironie fort divertissante. Quand il sera rendu avec son élève à la frontière de Prusse, vous enverrez au-devant de lui une bonne voiture.
— Oui, Sire.
— Et on l’y fera monter seul : seul, entendez-vous ? avec beaucoup d’égards.
— Oui, sire.
— Et ensuite ?
— Ensuite, Votre Majesté entend qu’on l’amène à Berlin ?
— Vous n’avez pas le sens commun aujourd’hui. J’entends qu’on le reconduise à Dresde, et de là à Prague, s’il le désire ; et de là même à Vienne, si telle est son intention : le tout à mes frais. Puisque j’ai dérangé un homme