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consuelo.

Mais quel était donc cet homme dont la responsabilité pesait si fortement sur la tête d’un autre, et dont la destruction avait semblé à Karl une vengeance si complète et si enivrante ? Consuelo revint sur la terrasse pour lui arracher son secret, tout en continuant à le surveiller ; mais elle le trouva évanoui, et, ne pouvant aider ce colosse à se relever, elle descendit et appela d’autres domestiques pour aller à son secours.

« Ah ! ce n’est rien, dirent-ils en se dirigeant vers le lieu qu’elle leur indiquait : il a bu ce soir un peu trop d’hydromel, et nous allons le porter dans son lit. »

Consuelo eût voulu remonter avec eux ; elle craignait que Karl ne se trahît en revenant à lui-même, mais elle en fut empêchée par le comte Hoditz, qui passait par là, et qui lui prit le bras, se réjouissant de ce qu’elle n’était pas encore couchée, et de ce qu’il pouvait lui donner un nouveau spectacle. Il fallut le suivre sur le perron, et de là elle vit en l’air, sur une des collines du parc, précisément du côté que Karl lui avait désigné comme le but de son expédition, un grand arc de lumière, sur lequel on distinguait confusément des caractères en verres de couleur.

« Voilà une très-belle illumination, dit-elle d’un air distrait.

— C’est une délicatesse, un adieu discret et respectueux à l’hôte qui nous quitte, lui répondit-il. Il va passer dans un quart d’heure au pied de cette colline, par un chemin creux que nous ne voyons pas d’ici, et où il trouvera cet arc de triomphe élevé comme par enchantement au-dessus de sa tête.

— Monsieur le comte, s’écria Consuelo en sortant de sa rêverie, quel est donc ce personnage qui vient de nous quitter ?

— Vous le saurez plus tard, mon enfant.