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à la mesure, s’en prenait à ses courtisans ; mais les choses n’iront pas ainsi avec moi !

— Le baron Frédéric de Trenck a dit cela ? répliqua le baron de Kreutz, dont les yeux s’animèrent d’une colère subite et impétueuse. Eh bien ! reprit-il en se calmant tout à coup par un effort de sa volonté, et en parlant d’un ton d’indifférence, le pauvre diable doit avoir perdu l’envie de plaisanter ; car il est enfermé à la citadelle de Glatz pour le reste de ses jours.

— En vérité ! s’écria le Porpora : et qu’a-t-il donc fait ?

— C’est le secret de l’État, répondit le baron : mais tout porte à croire qu’il a trahi la confiance de son maître.

— Oui ! ajouta le lieutenant ; en vendant à l’Autriche le plan des fortifications de la Prusse, sa patrie.

— Oh ! c’est impossible ! dit Consuelo qui avait pâli, et qui, de plus en plus attentive à sa contenance et à ses paroles, ne put cependant retenir cette exclamation douloureuse.

— C’est impossible, et c’est faux ! s’écria le Porpora indigné ; ceux qui ont fait croire cela au roi de Prusse en ont menti par la gorge !

— Je présume que ce n’est pas un démenti indirect que vous pensez nous donner ? dit le lieutenant en pâlissant à son tour.

— Il faudrait avoir une susceptibilité bien maladroite pour le prendre ainsi, reprit le baron de Kreutz en lançant un regard dur et impérieux à son compagnon. En quoi cela nous regarde-t-il ? et que nous importe que maître Porpora mette de la chaleur dans son amitié pour ce jeune homme ?

— Oui, j’en mettrais, même en présence du roi lui-même, dit le Porpora. Je dirais au roi qu’on l’a trompé ; que c’est fort mal à lui de l’avoir cru ; que Frédéric de