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consuelo.

heureux d’admirer cette belle résidence : le roi notre maître n’en a pas une qu’on puisse comparer à celle-ci. »

Ce compliment rendit au Prussien toute la bienveillance du seigneur morave. On se leva de table. Le Porpora, qui se souciait moins de la promenade que de la répétition, voulut s’en dispenser.

« Non pas, dit le comte ; promenade et répétition, tout cela se fera en même temps ; vous allez voir, mon maître.

Il offrit son bras à Consuelo et passant le premier :

« Pardonnez, messieurs, dit-il, si je m’empare de la seule dame que nous ayons ici dans ce moment : c’est le droit du seigneur. Ayez la bonté de me suivre : je serai votre guide.

— Oserai-je vous demander, monsieur, dit le baron de Kreutz, adressant pour la première fois la parole au Porpora, quelle est cette aimable dame ?

— Monsieur, répondit le Porpora qui était de mauvaise humeur, je suis italien, j’entends assez mal l’allemand, et le français encore moins. »

Le baron, qui jusque-là, avait toujours parlé français avec le comte, selon l’usage de ce temps-là entre les gens du bel air, répéta sa demande en italien.

« Cette aimable dame, qui n’a pas encore dit un mot devant vous, répondit sèchement le Porpora, n’est ni margrave, ni douairière, ni princesse, ni baronne, ni comtesse : c’est une chanteuse italienne qui ne manque pas d’un certain talent.

— Je m’intéresse d’autant plus à la connaître et à savoir son nom, reprit le baron en souriant de la brusquerie du maestro.

— C’est la Porporina, mon élève, répondit le Porpora.

— C’est une personne fort habile, dit-on, reprit l’autre, et qui est attendue avec impatience à Berlin. Puisqu’elle