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consuelo.

— Mais ne leur a-t-on pas permis tous les excès qu’ils ont commis sur les terres de l’Empire et sur celles des alliés ?

— Sans doute ; on leur a tout permis, puisqu’ils étaient nécessaires !

— Et maintenant ?

— Et maintenant qu’ils ne le sont plus, on leur reproche tout ce qu’on leur avait permis.

— Et la grande âme de Marie-Thérèse ?

— Ils ont profané des églises !

— J’entends. Trenck est perdu, monsieur le chanoine.

— Chut ! cela se dit tout bas, reprit-il.

— As-tu vu les pandoures ? s’écria Joseph en entrant tout essoufflé.

— Avec peu de plaisir, répondit Consuelo.

— Eh bien, ne les as-tu pas reconnus ?

— C’est la première fois que je les vois.

— Non pas, Consuelo, ce n’est pas la première fois que ces figures-là frappent tes regards. Nous en avons rencontré dans le Bœhmer-Wald.

— Grâce à Dieu, aucun à ma souvenance.

— Tu as donc oublié un chalet où nous avons passé la nuit sur la fougère, et où nous nous sommes aperçus tout d’un coup que dix ou douze hommes dormaient là autour de nous ? »

Consuelo se rappela l’aventure du chalet et la rencontre de ces farouches personnages qu’elle avait pris, ainsi que Joseph, pour des contrebandiers. D’autres émotions, qu’elle n’avait ni partagées ni devinées, gravaient dans la mémoire de Joseph toutes les circonstances de cette nuit orageuse.

« Eh bien, lui dit-il, ces prétendus contrebandiers qui ne s’aperçurent pas de notre présence à côté d’eux et qui sortirent du chalet avant le jour, portant des sacs et de lourds paquets, c’étaient des pandoures : c’étaient les