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consuelo.

« Voilà quelqu’un qui avait l’air de nous épier, dit Joseph.

— Et qui a l’air de se sauver, ajouta Consuelo, frappée de l’empressement avec lequel il s’était dérobé à ses regards. Je ne sais pourquoi il m’a fait peur. »

Elle rentra sur la scène et répéta son dernier acte, vers la fin duquel elle ressentit encore les mouvements d’enthousiasme qui l’avaient transportée. Quand elle voulut remettre son mantelet pour se retirer, elle le chercha, éblouie par une clarté subite : on venait d’ouvrir une lucarne au-dessus de sa tête, et le rayon du soleil couchant tombait obliquement devant elle. Le contraste de cette brusque lumière avec l’obscurité des objets environnants égara un instant sa vue ; et elle fit deux ou trois pas au hasard, lorsque tout à coup elle se trouva auprès du même personnage en manteau noir, qui l’avait inquiétée dans la coulisse. Elle le voyait confusément, et cependant il lui sembla le reconnaître. Elle fit un cri, et s’élança vers lui ; mais il avait déjà disparu, et ce fut en vain qu’elle le chercha des yeux.

« Qu’as-tu ? lui dit Joseph en lui présentant son mantelet ; t’es-tu heurtée contre quelque décor ? t’es-tu blessée ?

— Non, dit-elle, mais j’ai vu le comte Albert.

— Le comte Albert ici ? en es-tu sûre ? est-ce possible !

— C’est possible, c’est certain, » dit Consuelo en l’entraînant.

Et elle se mit à parcourir les coulisses, en courant et en pénétrant dans tous les coins. Joseph l’aidait à cette recherche, persuadé cependant qu’elle s’était trompée, tandis que le Porpora l’appelait avec impatience pour la ramener au logis. Consuelo ne trouva personne qui lui rappelât le moindre trait d’Albert ; et lorsque, forcée de