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consuelo.

stupide que méchante, et plus lâche que dangereuse. Vous ne comprenez rien aux belles choses, et ce serait temps perdu que d’essayer de vous les faire comprendre. Je n’ai qu’une chose à vous dire : cette jeune fille, cette vierge, cette sainte, comme vous l’avez nommée tout à l’heure en croyant railler, vous la souillez en lui parlant : ne lui parlez donc plus. Quant à cet enfant qui est né de vous, vous le flétririez en le touchant : ne le touchez donc pas. C’est un être sacré qu’un enfant ; Consuelo l’a dit, et je l’ai compris. C’est par l’intercession, par la persuasion de cette même Consuelo que j’ai osé me charger de votre fille, sans craindre que les instincts pervers qu’elle peut tenir de vous vinssent à m’en faire repentir un jour. Nous nous sommes dit que la bonté divine donne à toute créature le pouvoir de connaître et de pratiquer le bien, et nous nous sommes promis de lui enseigner le bien, et de le lui rendre aimable et facile. Avec vous, il en serait tout autrement. Veuillez donc, dès aujourd’hui, ne plus considérer cet enfant comme le vôtre. Vous l’avez abandonné, vous l’avez cédé, donné ; il ne vous appartient plus. Vous avez remis une somme d’argent pour nous payer son éducation… »

Il fit un signe à la jardinière, qui prévenue par lui depuis quelques instants avait tiré de l’armoire un sac lié et cacheté ; celui que Corilla avait envoyé au chanoine avec sa fille, et qui n’avait pas été ouvert. Il le prit et le jeta aux pieds de la Corilla, en ajoutant :

« Nous n’en avons que faire et nous n’en voulons pas. Maintenant, je vous prie de sortir de chez moi et de n’y jamais remettre les pieds, sous quelque prétexte que ce soit. À ces conditions, et à celle que vous ne vous permettrez jamais d’ouvrir la bouche sur les circonstances qui nous ont forcé d’être en rapport avec vous, nous vous promettons le silence le plus absolu sur tout ce