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petit Zingaro Bertoni s’empresser autour d’elle, et elle n’avait rien compris à son dévouement. En ce moment, elle chercha à rassembler ses souvenirs, et, n’y réussissant pas, elle resta sous le coup d’une inquiétude et d’un malaise qui la troublèrent durant toute la répétition. La manière dont la Porporina chanta sa partie ne contribua pas peu à augmenter sa méchante humeur, et la présence du Porpora, son ancien maître, qui, comme un juge sévère, l’écoutait en silence et d’un air presque méprisant, lui devint peu à peu un supplice véritable. M. Holzbaüer ne fut pas moins mortifié lorsque le maestro déclara qu’il donnait les mouvements tout de travers ; et il fallut bien l’en croire, car il avait assisté aux répétitions que Hasse lui-même avait dirigées à Dresde, lors de la première mise en scène de l’opéra. Le besoin qu’on avait d’un bon conseil fit céder la mauvaise volonté et imposa silence au dépit. Il conduisit toute la répétition, apprit à chacun son devoir, et reprit même Caffariello, qui affecta d’écouter ses avis avec respect pour leur donner plus de poids vis-à-vis des autres. Caffariello n’était occupé qu’à blesser la rivale impertinente de madame Tesi, et rien ne lui coûtait ce jour-là pour s’en donner le plaisir, pas même un acte de soumission et de modestie. C’est ainsi que, chez les artistes comme chez les diplomates, au théâtre comme dans le cabinet des souverains, les plus belles et les plus laides choses ont leurs causes cachées infiniment petites et frivoles.

En rentrant après la répétition, Consuelo trouva Joseph tout rempli d’une joie mystérieuse ; et quand ils purent se parler, elle apprit de lui que le bon chanoine était arrivé à Vienne ; que son premier soin avait été de faire demander son cher Beppo, et de lui donner un excellent déjeuner, tout en lui faisant mille tendres questions sur son cher Bertoni. Ils s’étaient déjà entendus sur les