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consuelo.

À quoi Corilla répondit par ceux-ci :

 «… E ti par poco,
Quel che sai de’miei casi ?[1] »

En cet endroit, la Corilla fut interrompue par un grand éclat de rire de Caffariello ; et, se tournant vers lui avec des yeux étincelants de colère :

« Que trouvez-vous donc là de si plaisant ? lui demanda-t-elle.

— Tu l’as très-bien dit, ma grosse Bérénice, répondit Caffariello en riant plus fort ; on ne pouvait pas le dire plus sincèrement.

— Ce sont les paroles qui vous amusent ? dit Holzbaüer, qui n’eût pas été fâché de redire à Métastase les plaisanteries du sopraniste sur ses vers.

— Les paroles sont belles, répondit sèchement Caffariello, qui connaissait bien le terrain ; mais leur application en cette circonstance est si parfaite, que je ne puis m’empêcher d’en rire. »

Et il se tint les côtes, en redisant au Porpora :

 « E ti par poco,
Quel che sai di tanti casi ? »

La Corilla, voyant quelle critique sanglante renfermait cette allusion à ses mœurs, et tremblante de colère, de haine et de crainte, faillit s’élancer sur Consuelo pour la défigurer ; mais la contenance de cette dernière était si douce et si calme, qu’elle ne l’osa pas. D’ailleurs, le faible jour qui pénétrait sur le théâtre venant à tomber sur le visage de sa rivale, elle s’arrêta frappée de vagues réminiscences et de terreurs étranges. Elle ne l’avait jamais vue au jour, ni de près, à Venise. Au milieu des douleurs de l’enfantement, elle avait vu confusément le

  1. Ce que tu sais de mes aventures te paraît-il donc peu de chose ?