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consuelo.

lier d’or à chapiteau d’or, avec la devise ingénieuse que l’impératrice y a fait graver :

Perchè possa risparmiare i suoi occhi !

Voilà, en effet, qui est bien délicat et qui le faisait s’écrier avec emphase : Affettuosa espressione valutabile più assai dell’oro ! Oh ! le pauvre homme !

— Ô l’homme malheureux ! » dit Consuelo en soupirant.

Et elle rentra fort triste, car elle avait fait involontairement un rapprochement terrible entre la situation de Métastase à l’égard de Marianna et la sienne propre à l’égard d’Albert. « Attendre et mourir ! se disait-elle : est-ce donc là le sort de ceux qui aiment passionnément ? Faire attendre et faire mourir, est-ce donc là la destinée de ceux qui poursuivent la chimère de la gloire ? »

« Qu’as-tu à rêver ainsi ? lui dit le maestro ; il me semble que tout va bien, et que, malgré tes gaucheries, tu as conquis le Métastase.

— C’est une maigre conquête que celle d’une âme faible, répondit-elle, et je ne crois pas que celui qui a manqué de courage pour faire admettre Marianna au théâtre impérial en retrouve un peu pour moi.

— Le Métastase, en fait d’art, gouverne désormais l’impératrice.

— Le Métastase, en fait d’art, ne conseillera jamais à l’impératrice que ce qu’elle paraîtra désirer, et on a beau parler des favoris et des conseillers de Sa Majesté… J’ai vu les traits de Marie-Thérèse, et je vous le dis, mon maître, Marie-Thérèse est trop politique pour avoir des amants, trop absolue pour avoir des amis.

— Eh bien, dit le Porpora soucieux, il faut gagner l’impératrice elle-même, il faut que tu chantes dans ses appartements un matin, et qu’elle te parle, qu’elle cause avec toi. On dit qu’elle n’aime que les personnes ver-