comme un garçon… j’ai éprouvé je ne sais quel effroi, je ne sais quelle gêne dont je ne peux pas me rendre compte ; et il est certain que durant le voyage… s’il m’eût été permis d’être amoureux de vous… Mais tu diras que je déraisonne…
— Certainement, Joseph, tu déraisonnes ; et, de plus, tu perds le temps à babiller. Nous avons dix lieues à faire pour aller au prieuré et en revenir. Il est huit heures du matin, et il faut que nous soyons rentrés à sept heures du soir, pour le souper du maître. »
Trois heures après, Beppo et sa compagne descendirent à la porte du prieuré. Il faisait une belle journée ; le chanoine contemplait ses fleurs d’un air mélancolique. Quand il vit Joseph, il fit un cri de joie et s’élança à sa rencontre ; mais il resta stupéfait en reconnaissant son cher Bertoni sous des habits de femme.
« Bertoni, mon enfant bien-aimé, s’écria-t-il avec une sainte naïveté, que signifie ce travestissement, et pourquoi viens-tu me voir déguisé de la sorte ? Nous ne sommes point au carnaval…
— Mon respectable ami, répondit Consuelo en lui baisant la main, il faut que Votre Révérence me pardonne de l’avoir trompée. Je n’ai jamais été garçon ; Bertoni n’a jamais existé, et lorsque j’ai eu le bonheur de vous connaître, j’étais véritablement déguisée.
— Nous pensions, dit Joseph qui craignait de voir la consternation du chanoine se changer en mécontentement, que votre révérence n’était point la dupe d’une innocente supercherie. Cette feinte n’avait point été imaginée pour la tromper, c’était une nécessité imposée par les circonstances, et nous avons toujours cru que monsieur le chanoine avait la générosité et la délicatesse de s’y prêter.
— Vous l’avez cru ? reprit le chanoine interdit et