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consuelo.

sible pour remonter sur le théâtre. Ô Albert ! j’espère que je n’y parviendrai pas. »

Le lendemain, maître Porpora, ayant affaire en ville pour toute la journée, et trouvant Consuelo un peu pâle, l’engagea à faire un tour de promenade hors ville à la Spinnerin am Kreutz, avec la femme de Keller, qui s’était offerte pour l’accompagner quand elle le voudrait. Dès que le maestro fut sorti :

« Beppo, dit la jeune fille, va vite louer une petite voiture, et allons-nous-en tous deux voir Angèle et remercier le chanoine. Nous avions promis de le faire plus tôt, mais mon rhume me servira d’excuse.

— Et sous quel costume vous présenterez-vous au chanoine ? dit Beppo.

— Sous celui-ci, répondit-elle. Il faut bien que le chanoine me connaisse et m’accepte sous ma véritable forme.

— Excellent chanoine ! je me fais une joie de le revoir.

— Et moi aussi.

— Pauvre bon chanoine ! je me fais une peine de songer…

— Quoi ?

— Que la tête va lui tourner tout à fait.

— Et pourquoi donc ? Suis-je une déesse ? Je ne le pensais pas.

— Consuelo, rappelez-vous qu’il était aux trois quarts fou quand nous l’avons quitté !

— Et moi je te dis qu’il lui suffira de me savoir femme et de me voir telle que je suis, pour qu’il reprenne l’empire de sa volonté et redevienne ce que Dieu l’a fait, un homme raisonnable.

— Il est vrai que l’habit fait quelque chose. Ainsi, quand je vous ai revue ici transformée en demoiselle, après m’être habitué pendant quinze jours à te traiter