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consuelo.

Elle n’est pas mal, cette petite ; j’aime assez cette figure-là. C’est tout jeune, n’est-ce pas ? On dit qu’elle a eu du succès à Venise. Il faut que Porpora me l’amène demain.

— Il veut, dit la princesse, que vous la fassiez entendre à l’impératrice, et j’espère que vous ne lui refuserez pas cette grâce. Je vous la demande pour mon compte.

— Il n’y a rien de si facile que de la faire entendre à Sa Majesté, et il suffit que Votre Altesse le désire pour que je m’empresse d’y contribuer. Mais il y a quelqu’un de plus puissant au théâtre que l’impératrice. C’est madame Tesi ; et lors même que Sa Majesté prendrait cette fille sous sa protection, je doute que l’engagement fût signé sans l’approbation suprême de la Tesi.

— On dit que c’est vous qui gâtez horriblement ces dames, monsieur le comte, et que sans votre indulgence elles n’auraient pas tant de pouvoir.

— Que voulez-vous, princesse ! chacun est maître dans sa maison. Sa Majesté comprend fort bien que si elle intervenait par décret impérial dans les affaires de l’Opéra, l’Opéra irait tout de travers. Or, Sa Majesté veut que l’Opéra aille bien et qu’on s’y amuse. Le moyen, si la prima donna a un rhume le jour où elle doit débuter, ou si le ténor, au lieu de se jeter au beau milieu d’une scène de raccommodement dans les bras de la basse, lui applique un grand coup de poing sur l’oreille ? Nous avons bien assez à faire d’apaiser les caprices de M. Caffariello. Nous sommes heureux depuis que madame Tesi et madame Holzbaüer font bon ménage ensemble. Si on nous jette sur les planches une pomme de discorde, voilà nos cartes plus embrouillées que jamais.

— Mais une troisième femme est nécessaire absolument, dit l’ambassadeur de Venise, qui protégeait chau-