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consuelo.

lation, je supporterai tranquillement les bourrasques du Porpora ; je me laisserai même battre par lui, si cela peut le distraire du besoin de te tourmenter et de t’affliger.

En devisant ainsi avec Joseph, Consuelo travaillait sans cesse, tantôt à préparer avec lui les repas communs, tantôt à raccommoder les nippes du Porpora. Elle introduisit, un à un, dans l’appartement, les meubles qui étaient nécessaires à son maître. Un bon fauteuil bien large et bien bourré de crin, remplaça la chaise de paille où il reposait ses membres affaissés par l’âge ; et quand il y eut goûté les douceurs d’une sieste, il s’étonna, et demanda, en fronçant le sourcil, d’où lui venait ce bon siège.

« C’est la maîtresse de la maison qui l’a fait monter ici, répondit Consuelo ; ce vieux meuble l’embarrassait, et j’ai consenti à le placer dans un coin, jusqu’à ce qu’elle le redemandât. »

Les matelas du Porpora furent changés ; et il ne fit, sur la bonté de son lit, d’autre remarque que de dire qu’il avait retrouvé le sommeil depuis quelques nuits. Consuelo lui répondit qu’il devait attribuer cette amélioration au café et à l’abstinence d’eau-de-vie. Un matin, le Porpora, ayant endossé une excellente robe de chambre, demanda d’un air soucieux à Joseph où il l’avait retrouvée. Joseph, qui avait le mot, répondit qu’en rangeant une vieille malle, il l’avait trouvée au fond.

« Je croyais ne l’avoir pas apportée ici, reprit le Porpora. C’est pourtant bien celle que j’avais à Venise ; c’est la même couleur du moins.

— Et quelle autre pourrait-ce être ? répondit Consuelo qui avait eu soin d’assortir la couleur à celle de la défunte robe de chambre de Venise.

— Eh bien, je la croyais plus usée que cela ! dit le maestro en regardant ses coudes.