Page:Sand - Consuelo - 1856 - tome 3.djvu/110

Cette page a été validée par deux contributeurs.
100
consuelo.

peu de toilette aussi pendant que je me préparerai. »

Consuelo obéit, traversa l’antichambre, et, entrant dans le cabinet sombre qui allait devenir son appartement, elle endossa son éternelle robe noire et son fidèle fichu blanc, qui avaient fait le voyage sur l’épaule de Joseph.

« Pour aller à l’ambassade, ce n’est pas un très bel équipage, pensa-t-elle ; mais on m’a vue commencer ainsi à Venise, et cela ne m’a pas empêchée de bien chanter et d’être écoutée avec plaisir. »

Quand elle fut prête, elle repassa dans l’antichambre, et y trouva Haydn, qui crêpait gravement la perruque du Porpora, plantée sur un bâton. En se regardant, ils étouffèrent de part et d’autre un grand éclat de rire.

« Eh ! comment fais-tu pour arranger cette belle perruque ? lui dit-elle à voix bien basse, pour ne pas être entendue du Porpora, qui s’habillait dans la chambre voisine.

— Bah ! répondit Joseph, cela va tout seul. J’ai souvent vu travailler Keller ! Et puis, il m’a donné une leçon ce matin, et il m’en donnera encore, afin que j’arrive à la perfection du lissé et du crêpé.

— Ah ! prends courage, mon pauvre garçon, dit Consuelo en lui serrant la main ; le maître finira par se laisser désarmer. Les routes de l’art sont encombrées d’épines, mais on parvient à y cueillir de belles fleurs.

— Merci de la métaphore, chère sœur Consuelo. Sois sûre que je ne me rebuterai pas, et pourvu qu’en passant auprès de moi sur l’escalier ou dans la cuisine tu me dises de temps en temps un petit mot d’encouragement et d’amitié, je supporterai tout avec plaisir.

— Et je t’aiderai à remplir tes fonctions, reprit Consuelo en souriant. Crois-tu donc que moi aussi je n’aie pas commencé comme toi ? Quand j’étais petite, j’étais