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de la précipitation que de la réflexion. Par exemple, ma chère Porporina, il y a bien des jours, je pourrais dire bien des semaines, que j’ai une prière à vous faire, et j’ai tardé jusqu’à présent. Je crois que j’ai bien fait et que le moment est venu. Pouvez-vous m’accorder aujourd’hui l’heure d’entretien que je venais vous demander lorsque j’ai appris l’arrivée de monsieur votre frère ? Il me semble que cette heureuse circonstance est venue tout à point, et peut-être ne sera-t-il pas de trop dans la conférence que je vous propose.

— Je suis toujours et à toute heure aux ordres de votre seigneurie, répondit Consuelo. Quant à mon frère, c’est un enfant que je n’associe pas sans examen à mes affaires personnelles…

— Je le sais bien, reprit effrontément Anzoleto ; mais puisque monseigneur le comte m’y autorise, je n’ai pas besoin d’autre permission que la sienne pour entrer dans la confidence.

— Vous voudrez bien me laisser juge de ce qui convient à vous et à moi, répondit Consuelo avec hauteur. Monsieur le comte, je suis prête à vous suivre dans votre appartement, et à vous écouter avec respect.

— Vous êtes bien sévère avec ce bon jeune homme, qui a l’air si franc et si enjoué, » dit le comte en souriant ; puis, se tournant vers Anzoleto : « Ne vous impatientez pas, mon enfant, lui dit-il ; votre tour viendra. Ce que j’ai à dire à votre sœur ne peut pas vous être caché : et bientôt, j’espère, elle me permettra de vous mettre, comme vous dites, dans la confidence. »

Anzoleto eut l’impertinence de répondre à la gaieté expansive du vieillard en retenant sa main dans les siennes, comme s’il eût voulu s’attacher à lui, et surprendre le secret dont l’excluait Consuelo. Il n’eut pas le bon goût de comprendre qu’il devait au moins sortir du