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des compliments fort mielleux au bord des lèvres, et qui voulait lui donner une leçon de galanterie, s’écria qu’il comprenait fort bien que le comte Albert ne vît pas seulement la couleur de mon vêtement. C’était pour Albert l’occasion de me dire quelque chose de flatteur sur les roses de mes joues, ou sur l’or de ma chevelure. Il se contenta de répondre à l’abbé, d’un ton fort sec, qu’il était aussi capable que lui de distinguer les couleurs, et que ma robe était rouge comme du sang.

« Je ne sais pourquoi cette brutalité et cette bizarrerie d’expression me donnèrent le frisson. Je regardai Albert, et lui trouvai un regard qui me fit peur. De ce jour-là, je commençai à le craindre plus qu’à l’aimer. Bientôt je ne l’aimai plus du tout, et aujourd’hui je ne le crains ni ne l’aime. Je le plains, et c’est tout. Vous verrez pourquoi, peu à peu, et vous me comprendrez.

« Le lendemain, nous devions aller faire quelques emplettes à Tauss, la ville la plus voisine. Je me promettais un grand plaisir de cette promenade ; Albert devait m’accompagner à cheval. J’étais prête, et j’attendais qu’il vînt me présenter la main. Les voitures attendaient aussi dans la cour. Il n’avait pas encore paru. Son valet de chambre disait avoir frappé à sa porte à l’heure accoutumée. On envoya de nouveau savoir s’il se préparait. Albert avait la manie de s’habiller toujours lui-même, et de ne jamais laisser aucun valet entrer dans sa chambre avant qu’il en fût sorti. On frappa en vain ; il ne répondit pas. Son père, inquiet de ce silence, monta à sa chambre, et ne put ni ouvrir la porte, qui était barricadée en dedans, ni obtenir un mot. On commençait à s’effrayer, lorsque l’abbé dit d’un air fort tranquille que le comte Albert était sujet à de longs accès de sommeil qui tenaient de l’engourdissement, et que lorsqu’on