Page:Sand - Constance Verrier.djvu/61

Cette page n’a pas encore été corrigée

satisfaire sa larronnerie aux dépens de ma santé, et je résolus de la mettre à l’épreuve. Comme elle tournait le dos un instant, je fis adroitement disparaître le breuvage et lui laissai croire que je l’avais avalé.

« Elle comptait sans doute sur un prompt effet, car elle resta dans la chambre à me regarder d’une étrange manière. Je feignis de tomber accablée sur mon lit sans songer à m’enfermer. Je la sentis alors approcher de moi, me passer la lumière devant les yeux, me secouer les mains, remuer les rideaux, et je l’entendis marcher par la chambre, faire rouler les meubles et mener tout le bruit possible pour s’assurer de ma léthargie. Après quoi elle sortit en ricanant et en fermant ma porte derrière elle.

« Je me relevai aussitôt pour tirer les verrous et regarder l’argent que j’avais en caisse et dont, cette fois, je savais bien le compte. Elle ne m’avait rien pris. Elle n’avait touché ni à mes hardes, ni à mes bijoux. Mais alors pourquoi donc avait-elle pris tant de soin d’éprouver la pesanteur de mon sommeil ?

« Il me tardait de revoir le comte pour lui faire part de mes vagues frayeurs. Cette vieille avait quelque projet sinistre. Elle paraissait très-liée avec le jardinier, et le comte m’ayant défendu de lui écrire autrement que par l’intermédiaire de ce messager, je n’osais l’appeler à mon secours.

« Décidée à veiller sur ce mystère, je ne me livrai au repos que quand le jour fut venu, et, le lendemain