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duchesse, comme vous le méprisez vous-même, vous qui avez cherché le plaisir quand vous aviez l’idéal ? Ah ! malheureux que vous êtes ! Vous aimiez cette créature incomparable, vous aviez compris le ciel, et vous n’avez pas su vous vaincre. Vous avez cédé aux besoins du cœur avec une autre, vous m’avez aimée, moi qui en rougis à présent ! Eh bien, cela est plus coupable encore que d’avoir philosophé sur l’oreiller de la d’Évereux. Vous avez été deux fois infidèle en quelques jours, infidèle parle cœur et par les sens ! Il n’est resté à Constance que votre imagination, peut-être ! Eh bien, demandez à Dieu qu’en vous quittant, elle vous garde dans un coin de la sienne, car un peu de regret et quelques larmes de souvenir, voilà tout ce que vous pouvez espérer d’elle, et ce sera encore plus que vous ne méritez. »

La Mozzelli était dans un paroxysme d’exaltation. Elle parla encore longtemps à Raoul sur ce ton de mépris et de haine qui eût eu plus de force véritable si sa propre passion froissée n’eût trouvé instinctivement son compte à cette vengeance, adieu suprême et violent d’une âme généreuse, mais à jamais privée de frein. Raoul l’écouta sans l’interrompre, comme s’il n’eût pas voulu perdre un mot de sa condamnation. — Je mérite tout cela, lui-dit-il, quand, épuisé de fatigue morale, elle s’arrêta pour regarder sa pâleur sinistre. Vous êtes une divinité vengeresse, une fureur que Dieu déchaîne sur le coupable ; mais si la sentence est aussi effroyable que vous l’annoncez, il n’est