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ma chère amie, c’est l’avant-goût d’une félicité qu’il faut mériter pour en savoir le prix, et qu’on peut toujours atteindre quand on ne s’égare pas à la poursuite d’autres rêves.

— Mais, pour cultiver ainsi le grand amour en soimême, il faut, observa la Mozzelli, avoir un but, un objet aimé et digne de l’être ! Où réside ce phénix ? Pouvez-vous me donner l’adresse d’un homme accompli, de la perfection en chair et en os ?

— Il n’y a d’homme accompli que celui qu’on aime, répondit Constance. Il est toujours parfait, celui-là, puisqu’on aime tout en lui !

La Mozzelli mit ses deux mains sur sa figure et pleura amèrement. — Ah ! que vous êtes heureuse, vous, dit-elle, de pouvoir aimer comme cela ! Constance s’efforça encore de lui rendre l’espérance et la confiance en elle-même, et elle parvint à la calmer.

Quand elles se quittèrent, Constance pria la Mozzelli, qui le lui promit et tint parole, de ne raconter à personne ce qu’elle lui avait confié de sa situation. Je n’en fais pas mystère, lui dit-elle, à mes proches parents et aux amis intimes et sérieux que m’a laissés mon père. Tous ont approuvé son choix et tous me gardent le secret. Ce secret, mon père l’avait exigé, quant au monde, par prudence, et Abel se le serait imposé de lui-même par délicatesse. Il voulait me laisser entièrement libre de me rétracter sans éclat. Je n’ai pas accepté cette liberté-là, moi, mais j’ai senti