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difficile ? reprit mademoiselle Verrier ; vous ne savez pas si, à une certaine hauteur et pourtant après certains écueils dépassés, le reste du chemin n’est pas très-doux. Moi, je n’y suis pas encore ; l’amour sans le mariage est nécessairement incomplet ; mais je monte tout doucement, avec obstination, avec patience. Vous avez perdu beaucoup de temps à faire l’école buissonnière ; mais nous ne sommes pas ici devant un jury de duchesses philosophes ou de casuistes intolérants. Nous sommes seules devant Dieu ; je crois qu’il nous entend et qu’il nous accueille l’une et l’autre également, lui qui écoute toutes les voix qui montent vers lui, innocentes ou repenties. Nous pouvons donc le prier de nous donner la force ; et, s’il ne se rendait pas à un désir puissant et vrai, c’est qu’il n’existerait pas.

— Ah ! vous avez la foi à ce point-là, vous ! Je le comprends ; vous n’avez rien fait pour la perdre !

— Ne dites pas que vous l’avez perdue, vous qui n’avez pas beaucoup fait pour l’acquérir.

— Je l’aurais eue, je l’aurais gardée à la villetta de Recco, si le vieux comte n’eût été un infâme !

— Qu’est-ce que l’infamie d’un homme prouve contre la sainteté de Dieu ? Votre esprit a été troublé dans sa foi, et votre conscience n’a pas réagi assez victorieusement. L’agitation de la vie, l’amour de l’art, une soif de gloire et d’émotions, voilà votre excuse. Je l’accepte ; mais soyez plus sévère envers vous-même que je ne veux l’être, et vous verrez que