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mentir, et peut-être ne m’y croirai-je jamais forcée ; mais j’aime à me taire, et je me sens moins que jamais disposée à parler de moi, du moment que votre moquerie m’interroge comme un oracle.

— C’est-à-dire, reprit madame d’Évereux, que vous ne nous jugez pas dignes de vous entendre ?

— Eh bien ! dit la Mozzelli, elle a raison. Qu’elle ne dise rien ! Nous sommes indignes de sa confiance, c’est vrai ; moi mauvaise fille, pour avoir mal aimé ; vous, belle duchesse, pour n’avoir pas aimé du tout !

— Et qui vous prouve qu’elle aime bien ? reprit la duchesse. Elle est fort prude, voilà tout ce que nous savons d’elle. Tenez ! laissons-la dans son orgueil, notre délicieuse Vestale, ou dans sa frayeur ! car le feu sacré n’est pas facile à entretenir et elle fera bien de veiller ! Je crains, moi, qu’elle ne joue une grosse partie. Aimer depuis longtemps, en attendant le mariage, c’est-à-dire languir, rêver, s’exalter dans la souffrance, c’est se préparer d’effroyables déceptions ! Prenez garde, chère Constance, que votre fiancé ne soit en ce moment, comme était jadis le mien, dans les coulisses de l’Opéra !

— Oh ! pour cela je ne crains rien, répondit Constance en riant.

— Il est donc bien loin d’ici ?

— Je vous ai dit que je ne voulais rien dire !

— Alors, bonsoir ! voilà qu’il est minuit et ma belle-sœur m’attend pour aller au bal. Ah ! mon Dieu, quand je pense que je ne suis pas habillée !