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faute. J’ai aimé mon mari, lui seul, et pourtant…

— Pourtant, dit la cantatrice, vous avez essayé d’en aimer au moins un autre ?

— J’ai essayé d’en aimer plusieurs autres. Je ne suis pas forcée de vous dire si j’ai poussé loin l’expérience. Ceci ne regarde que moi, et je trouve conforme à la pudeur de mon rang et de mon état dans le monde qu’une femme ne raconte pas si son cœur a battu plus ou moins de désir ou de joie, à moins qu’il ne s’agisse de son mari ; et, sur ce point, j’ai été aussi explicite que vous pouviez le désirer. Je vous ai raconté l’invasion d’un trouble mortel et délicieux qui prit d’autant plus d’énergie, qu’à peine avoué, il fut repoussé et froissé. Donc, moi aussi, j’ai connu l’amour, ses langueurs, ses jalousies, ses larmes et ses rêves sans fin. Mais j’ai reconnu à temps que ce prétendu bienfait du ciel était une effroyable maladie de l’âme, et si j’ai une obligation quelconque envers la mémoire de mon cher duc, c’est que cet homme raisonnable et courageux ne m’ait point leurrée d’un faux espoir. Dès le début, il a eu l’esprit et la loyauté de me dire : « Arrêtez-vous, je ne veux pas d’amour dans ma maison. » Bien que l’arrêt fût fort cruel, il a chassé le mal de mon cœur et m’a préservée des passions auxquelles, toute duchesse que j’étais, je me sentais aussi disposée et aussi exposée alors que la première venue.

— Donc, j’avais raison, dit la cantatrice, les hommes ne savent point aimer. Il y a toujours, dans la vie