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— Son camarade ! s’écria M. Dietrich en s’adressant à moi avec un haussement d’épaules ; elle devient folle, ma chère amie !

— Oui, je sais bien, reprit Césarine, ça ne se dit pas, ça ne se fait pas. Le fait est, ajouta-t-elle en éclatant de rire, que je n’ai pas le sens commun, cher papa ! Eh bien ! je dirai à M. de Rivonnière que vous m’avez trouvée absurde et que nous ne devons plus nous voir.

Là-dessus, elle prit son ouvrage et se mit à travailler avec une sérénité complète. Son père l’observa quelques instants, espérant voir percer le dépit ou le chagrin sous ce facile détachement. Il ne put rien surprendre ; toute la contrariété fut pour lui. Il avait pris Jacques de Rivonnière en grande amitié. Il l’avait beaucoup encouragé, il le désirait vivement pour son gendre. Il n’avait pas assez caché ce désir à Césarine. Naturellement elle était résolue à l’exploiter.

Quand nous fûmes seules, je la grondai. Comme toujours, elle m’écouta avec son bel œil étonné ; puis, m’ayant laissée tout dire, elle me répondit avec une douceur enjouée :

— Vous avez peut-être raison. Je fais de la peine à papa, et j’ai l’air de le forcer à tolérer une situation excentrique entre le marquis et moi, ou de renoncer à une espérance qui lui est chère. Il faut donc que je renonce, moi, à une amitié qui m’est douce, ou que j’épouse un homme pour qui je n’ai pas d’amour pour qui je n’aurai par conséquent ni respect ni enthousiasme. Est-ce là ce que l’on veut ? Je suis peut-