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possible pour en finir bien vite : tous les remèdes qu’on me présente, je les mets dans ma bouche, mais je ne les avale que quand on m’y force en me regardant bien. La nuit, quand on dort un instant, je me lève, je prends froid. Si on me dit de prendre de l’opium, j’en prends trop. Je cherche tout ce qui peut me faire mal. Je fais semblant de ne pouvoir dormir que sur la poitrine, et je m’étouffe le cœur jusqu’à ce que je perde connaissance. Je voudrais savoir autre chose pour me faire mourir !

— Assez, Marguerite ! lui dit Paul en se montrant. J’en sais assez pour te sauver, et je te sauverai ; tu le voudras, et nous serons heureux, tu verras ! Nous oublierons tout ce que nous avons souffert. Montre-moi cette lettre dont tu parles, et ne crains rien.

Il lui prit doucement la lettre, la lut sans émotion, la jeta par terre et la roula sous son pied.

— C’est une lettre infâme ! s’écria-t-il ; c’est une insulte à mon honneur ! Comment, j’aurais tendu la main à son mari après le duel, j’aurais accepté ses excuses, pardonné à son repentir, conseillé le mariage, et après le mariage le rapprochement, tout cela pour le tromper, pour posséder sa femme avant lui et m’avilir à ses yeux plus qu’il n’était avili aux miens par sa conduite envers toi ! Tiens, cette femme est plus folle que lui, et sa démence n’a rien de noble. C’est l’égarement d’une conscience malade, d’un esprit faux, d’un méchant cœur. Je devrais la haïr, car son but n’est pas même la passion aveugle : elle a espéré me punir des conseils sévères que je lui ai