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une sorte de crainte, elle amassait des tempêtes dans son cœur.

Comme nous étions toutes les trois dans son petit jardin, Paul se trouvant occupé dehors, elle rompit la digue que lui imposait notre absence de curiosité.

— Paul s’est donc bien amusé hier soir chez vous, nous dit-elle d’un ton assez aigre, qu’il a manqué le train et n’est rentré qu’à onze heures, à pied, par les sentiers ?

— En vérité, lui dit Césarine, est-ce que vous avez été inquiète ?

— Bien sur que je l’ai été. Un homme seul comme ça sur des chemins où on ne rencontre que des gens qui rôdent on ne sait pourquoi ! Vous devriez bien me le renvoyer plus tôt. Quand il n’arrive pas à l’heure, je compte les minutes ; c’est ça qui me fait du mal !

— Chère enfant, reprit Césarine avec une douceur admirable, nous nous arrangerons pour que cela n’arrive plus. Nous gronderons Bertrand quand les pendules retarderont.

— Vous pouvez bien les avancer d’une heure, car il prend tant d’amusement chez vous qu’il m’en oublie.

— On ne s’amuse pas chez nous, Marguerite ; on est très-sérieux au contraire.

— Justement ; c’est sa manière de s’amuser, à lui ; mais vous ne me ferez pas croire que vous ne receviez pas quantité de belles dames ?

— C’est ce qui vous trompe. Il ne vient plus de belles dames chez moi.