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de l’esprit et de l’instruction pour ne pas ennuyer un homme qui en a tant ! Moi, quand je demandais le mariage, je ne savais pas ça. Je croyais qu’il devait se plaire avec moi et son enfant, et je lui disais toujours :

« — Où seras-tu plus aimé et plus content qu’avec nous ? »

Il n’a jamais été contre, car il me répondait : « — Tu vois bien que je ne me trouve pas mieux ailleurs, puisque je ne vous quitte jamais que je n’y sois forcé. » Aujourd’hui pourtant il pourrait dîner avec nous tous les jours, et c’est bien rare qu’il revienne ici avant neuf heures et demie du soir. Il ne voit plus Pierre s’endormir. Il le regarde bien dans son petit lit, et le matin il le porte dans le jardin et le dévore de caresses ; mais je le regarde à travers le rideau de ma fenêtre, et je lui vois des airs tristes tout d’un coup. Je me figure même qu’il a des larmes dans les yeux. Si j’essaye de le questionner, il me répond toujours avec sa même douceur et me gronde avec sa même bonté ; cependant il a l’air sévère malgré lui, et je vois qu’il a de la peine à se retenir de me dire que je suis une ingrate. Alors je lui demande pardon et ne lui dis plus rien : j’ai trop peur de le tourmenter ; mais il me reste un pavé sur le cœur. Je chante, je ris, je travaille, je remue pour me distraire. Ça va bien tant que l’enfant est éveillé et que je m’occupe de lui ; quand il ferme ses yeux bleus, le ciel se cache. Madame Féron s’en va dormir, aussi tout de suite. Paul m’a défendu de lui faire des