Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/26

Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’il ne pense », je céderai à tout par amitié pour lui, je vous chérirai pour celle que vous me montrez sans pédanterie, je vous rendrai très-heureux, seulement…

— Seulement quoi ? dites, ma chérie.

— Rien, répondit-elle en me baisant la main ; mais son bel œil caressant et fier acheva clairement sa phrase ; je vous rendrai très-heureux, seulement vous ferez toutes mes volontés.

Elle savait bien ce qu’elle disait là, l’énergique, l’obstinée, la puissante fillette ! Elle réunissait en elle la souplesse instinctive de sa mère et l’entêtement voulu de son père. Au dire du vieux médecin de la famille, que je consultais souvent sur le régime à lui faire suivre, elle avait comme une double organisation, toute la patience de la femme adroite pour arriver à ses fins, toute l’énergie de l’homme d’action pour renverser les obstacles et faire plier les résistances. — En ce cas, pensais-je, de quoi donc se tourmente son père ? Il la veut forte, elle est invincible. Il cherche à la bronzer, elle est le feu qui bronze les autres. Il prétend lui apprendre à souffrir, comme si elle n’était pas destinée à vaincre ! Ceux qui savent dominer souffrent-ils ?

Elle m’effraya ; je me promis de la bien étudier avant de me décider à graviter comme un satellite autour de cet astre. Il s’agissait de savoir si elle était bonne autant qu’aimable, si elle se servirait de sa force pour faire le bien ou le mal.

Cela n’était pas facile à deviner, et j’y consacrai plus d’une année. Un jour, à la campagne, je fus importunée