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Nous restâmes donc dans la serre aux camélias, où le marquis vînt nous joindre.

— Merci, mon ami, lui dit-elle en lui tendant la main. Vous êtes venu à mon rendez-vous ; vous avez compris que je ne pouvais plus, jusqu’à nouvel ordre, vous mettre en présence de mon père. Asseyez-vous sur ce banc, nous sommes très-bien ici pour causer.

Monsieur de Rivonnière, j’ai réfléchi, j’ai vu clair dans ma conduite, je l’ai condamnée, et c’est à vous que je veux me confesser. Je ne vous ai pas trahi, puisque je n’ai jamais eu d’amour pour vous, et je ne vous ai pas trompé en mettant mon refus sur le compte d’une aversion prononcée pour le mariage. J’étais sincère, je n’aimais personne, et je croyais que l’amour de ma liberté ne serait jamais assouvi. Il l’a été bien plus vite que je ne pensais. Le monde m’a ennuyé, la liberté m’a épouvantée. J’ai vu quelqu’un qui m’a plu, que je n’épouserai peut-être pas, qui probablement ne saura jamais que je l’aime, mais qu’il m’est impossible de ne pas aimer. Que voulez-vous que je vous dise ? Je me croyais une femme très-forte, je ne suis qu’une enfant très-faible, et d’autant plus faible que je ne croyais pas à l’amour et ne m’en méfiais pas. Je lui appartiens maintenant et j’en meurs de honte et de chagrin, puisque ma passion n’est point partagée. Si vous souhaitiez une vengeance, soyez satisfait. Je suis aussi punie qu’on peut l’être d’avoir préféré un inconnu à un ami éprouvé ; mais vous n’êtes ni cruel ni égoïste, ni vindicatif, et, si vous avez eu l’apparence contre vous au point de