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SCÈNE V. — LE CAPITAINE, HENRI, MOTUS.


MOTUS, (trompette de cavalerie, républicain à tous crins, très-aimé dans le régiment.) Mon capitaine, sans te commander, je t’annonce qu’on vient de prendre un espion qui essayait de se faufiler subrepticement. Faut-il lui faire son affaire ?

LE CAPITAINE. Il faut d’abord savoir si c’est réellement un espion. Amène-le.

MOTUS. C’est que, sans t’offenser, mon capitaine, je ne crois pas que tu puisses lui tirer une parole du ventre. Il n’a pas l’air de comprendre ce qu’on lui dit, ou il fait semblant d’être Breton.

LE CAPITAINE, à Henri. Savez-vous la langue ?

HENRI. Ma foi, non, pas un mot.

LE CAPITAINE, à Motus. Où est-il ?

MOTUS. Il est là, mon capitaine. (Allant à la porte.) Allons, avance à l’ordre, l’homme à la tignasse jaune ! (Cadio paraît, amené par deux cavaliers. Son habit de toile est en lambeaux. Il a une peau de chèvre sur les épaules.)

LE CAPITAINE, bas, à Henri, après avoir fait signe à Motus et aux deux autres cavaliers de sortir. Interrogez-le. Vous savez mieux que moi parler aux paysans.

HENRI, à Cadio. Est-ce que tu ne parles pas français ?

CADIO, triste et abattu. Je parle français, latin au besoin. Du moins, j’en sais quelque peu.

HENRI. Alors, tu es prêtre ou moine ?

CADIO. Non, je suis sonneur de biniou.

HENRI. Sorcier, par conséquent ?

CADIO. Sorcier ? Oh ! Jésus, non ! Je renie le diable !

HENRI. Mais tu as beau le renier, il court après toi, la nuit, dans les bois ou sur les bruyères. Il t’arrache