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Nous voici sur vos terres avec une apparence d’invasion qui vous délie de vos promesses à la bourgeoisie. Nous ouvrons nos rangs avec respect pour vous faire place. Entrez-y, c’est aujourd’hui qu’il le faut ou jamais !

LE COMTE, entraîné, faisant un pas. Eh bien… (Il s’arrête en trouvant Mâcheballe devant lui.)

MACHEBALLE, faisant assaut de popularité avec Saint-Gueltas et voulant se targuer d’avoir décidé le comte. Oui, Sacrebleu ! c’est aujourd’hui ! ça n’est pas demain ! Il y a assez longtemps que les nobles font trimer nos sabots pour ménager leurs escarpins, et le sang que nous avons perdu l’an passé, il l’ont regardé benoîtement couler sans se déranger de leurs chasses, galanteries et ripailles ! On a assez de ça ! Croyez-vous qu’on va se battre toute la vie comme des chiens pour rétablir vos priviléges ? Non, par la peau du diable ! on n’a plus qu’un intérêt, qui est aussi bien le vôtre que celui du paysan. C’est que la monarchie soit rétablie avec l’abolition des dîmes, de la milice, des tailles, et qu’on nous rende nos couvents, nos bons prêtres et nos fêtes. On s’était tous réconciliés en 89. Faut y revenir ! Faut que le seigneur fasse ce qui est le bien du paysan, et, puisque le paysan veut venger son roi et son Dieu, faut que le noble se batte comme nous autres, que ceux qui sont en retard se dépêchent et fassent sonner le tocsin de leurs paroisses, ou bien on le sonnera nous-mêmes, et on mettra le feu aux maisons des feugnans ; ça y est-il, vous autres ! (Cris et clameurs des insurgés qui envahissent le salon. Saint-Gueltas va vers eux avec une autorité irrésistible et les fait reculer.)

LE COMTE, avec énergie. Devant les menaces, vous comprenez, monsieur le marquis, que je dis non,