Page:Sand - Cadio.djvu/45

Cette page n’a pas encore été corrigée

commanderez un détachement. (À Raboisson montrant la Tessonnière.) Et celui-ci ?

RABOISSON, bas. Le plus grand poltron de la terre. Je te défie de le faire marcher.

SAINT-GUELTAS. Nous allons bien voir. (À la Tessonnière.) Monsieur est certainement des nôtres ?

LA TESSONNIÈRE. Oh ! moi, je suis trop vieux pour guerroyer.

SAINT-GUELTAS. Pas plus âgé que M. Stock ?

LA TESSONNIÈRE. Ma religion me défend de verser le sang.

SAINT-GUELTAS. Eh bien, monsieur, vous êtes un serviteur inutile ici. Je vais vous employer, moi !

LA TESSONNIÈRE. À quoi donc, s’il vous plaît ?

SAINT-GUELTAS. J’ai promis, en échange de plusieurs de mes braves tombés dans les mains des bleus, de rendre un nombre égal de transfuges de la République. Le nombre n’y est pas, vous le compléterez.

LA TESSONNIÈRE. Vous voulez me faire passer… ? C’est m’envoyer à la guillotine !

SAINT-GUELTAS. C’est vous envoyer au ciel. Choisissez, ou de verser le sang des scélérats, ou de donner le vôtre à la bonne cause.

LA TESSONNIÈRE, éperdu. Je me battrai, monsieur, j’aime mieux me battre ! (Raboisson rit.)

LE COMTE. Je ne sais si la chose est plaisante, mais je la trouve arbitraire et cruelle. Quels que soient les pouvoirs de M. le marquis, je proteste contre toute contrainte exercée dans ma maison.

LOUISE, animée. Je m’y oppose aussi ! Monsieur est notre parent, le plus ancien de nos amis. Il est âgé, infirme. Brave ou non, je le respecte et je l’aime.