de la beauté salué par toutes les créatures. Ah ! oui, nous sommes heureux, et ce moment résume des siècles de repos et de délices ; c’est un rêve du ciel qui rachète des années de douleur et de fatigue !
MARIE. Oui, je le sens aussi, il y a de ces moments où tout ce que l’on a souffert, tout ce que l’on doit souffrir encore n’est plus rien. C’est comme un compte à part dont on s’occupera quand on y sera forcé. En attendant, on dépense toute son âme dans une sainte ivresse. Oh ! que c’est bon et beau de s’estimer l’un l’autre jusqu’à l’adoration ! Qu’importe après cela que les hommes nous accusent, nous proscrivent ou nous tuent ? Ce n’est pas leur faute s’ils ne comprennent pas l’innocence ! Ils seront bien assez punis, puisqu’ils ne connaîtront pas les joies divines que savourent les cœurs purs. — Je me souviens en ce moment d’un homme qui trouvait dans son désespoir la force de braver le ciel… Il osait dire que la mort n’était douce qu’à celui qui avait satisfait ses passions. Il mentait, n’est-ce pas ? la mort n’est douce qu’à celui qui les a vaincues pour faire de son âme le sanctuaire d’un grand amour ?
HENRI. Arrière les sophismes de ces libertins sans cœur qui s’arrogent l’impunité parce qu’ils savent braver la mort ! Moi, je sens qu’on peut la bénir quand on se sent digne de retrouver au delà de ce monde, dans la grande patrie qui réunira tous les justes, l’être qu’on a chéri uniquement et saintement respecté sur la terre !
MARIE, tressaillant. Voilà Cadio prêt à partir. Il vous attend.
HENRI. Déjà, mon Dieu !
MARIE. Henri, chaque moment qui va s’écouler,