CADIO. Tu me crois fou ?
HENRI. Non, certes ! mais trop exalté. Je sais bien que c’est ton état naturel, mais il ne faut pas que la fièvre s’y ajoute.
CADIO. Est-ce que je l’ai ?
HENRI. Non.
CADIO. Alors, je peux te parler sans te causer d’inquiétude. Je n’aime guère à parler, et peut-être ne sais-je pas bien encore. Pourtant il faut que j’essaye, il le faut ! Tu sais ce qui s’était passé à la ferme du Mystère quand tu m’y as trouvé assassiné par l’ordre de M. Saint-Gueltas ?
HENRI. Ma foi, ce que tu m’as raconté était si étrange… Ce n’était pas une divagation ?
CADIO. C’était la vérité.
HENRI. Tu avais contracté une sorte de mariage avec ma cousine pour la sauver en cas d’arrestation ?
CADIO. Oui, cela est arrivé. Le mariage ne valait rien, on s’était servi de faux noms.
HENRI. Alors, il n’eût servi à rien.
CADIO. Je ne savais pas ; j’ai agi comme elle l’a voulu. J’étais content de lui rendre service et de lui inspirer de la confiance ; et puis, quand j’ai vu que Saint-Gueltas la trompait, j’ai voulu l’avertir : on m’a répondu par une insulte et un coup de poignard.
HENRI. Tu ne peux pas croire que Louise…
CADIO. Le coup de poignard venait de lui, l’insulte venait d’elle !
HENRI. Tu étais indigné, furieux, en effet.
CADIO. C’est la première fois de ma vie que j’ai connu la colère ; mais la colère n’est pas la fureur, qui est la folie. La colère est une bonne chose, c’est une clarté qui se fait dans l’esprit. On dit que Dieu a tiré