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Ça le rend craintif ou envieux, malheureux ou méchant. Moi, je n’ai eu qu’une peur en ce monde, celle de mourir damné. Je ne l’ai plus, je suis tranquille comme me voilà.

LOUISE. Qui t’a ôté cette crainte ?

CADIO. Un ou deux moments de courage que j’ai eus, et des idées… à moi tout seul ! la nuit avec ses étoiles, le chant des vagues quand j’ai revu dernièrement le pays de Carnac, plus de menaces d’enfer pesant sur moi, les champs ravagés, les châteaux détruits, et surtout le couvent en ruine, où le rouge-gorge chantait la semaine passée, et où j’ai cueilli des violettes dans les fentes des tombeaux… Je regardais la croix brisée et les pierres des anciens dieux, couchées pêle-mêle, je me disais : « Tout passe, et Dieu reste ! »

LOUISE, étonnée. Où prends-tu donc tout ce que tu dis-là, Cadio ?

CADIO, montrant son biniou. Je ne sais pas : là peut-être.



Scène VI. — Les Mêmes, CORNY, REBEC, LA TESSONNIÈRE, ROXANE, puis MOTUS, HENRI, le Délégué de la Convention, premier Secrétaire, deuxième Secrétaire, LA MÈRE CORNY, un Sous-officier.


CORNY, accourant du dehors, suivi de Rebec. Alerte, alerte ! On voit arriver par là (il montre le chemin) des cavaliers, une voiture ; on ne sait point ce que c’est ! mais faut vous en aller dans les taillis, demoiselle, et bien vite !

LOUISE. Oui, mon ami ; mais les autres ?

CORNY, montrant la Tessonnière et Roxane qui sortent de la maison.