Page:Sand - Antonia.djvu/95

Cette page n’a pas encore été corrigée

des salons qui écraseraient tout Paris, et où tout Paris s’écraserait pour prendre part à vos fêtes ; car, au bout du compte, tout Paris n’a qu’une chose en tête, qui est de s’amuser et d’aller où l’on s’amuse. Vous auriez chez vous bals, concerts et spectacles, des artistes, de beaux chanteurs et de beaux parleurs, enfin des gens d’esprit pour secouer et divertir les gens de qualité qui n’ont pas d’esprit. Ah ! si j’avais cinq millions, moi, si j’en avais seulement deux, je saurais bien quoi en faire ! Voyons, ne me jugez pas folle et ne soyez pas poltronne. Acceptez la roture et l’opulence.

— Et la vieillesse du mari ?

— Raison de plus !

Julie s’indigna, Amélie se piqua ; elles furent brouillées. Madame d’Ancourt n’avait pas nommé le prétendant ; Julie n’avait pas songé à s’en enquérir. Elle en chargea Marcel, voulant que son refus pût être clairement notifié. Elle craignait que, par dépit, son impétueuse amie ne la compromît en laissant des espérances à son protégé. Marcel alla chez madame d’Ancourt pour savoir le nom de l’homme aux cinq millions.

— Ah ! on se ravise ? s’écria la baronne.

— Non, madame, au contraire.

— Eh bien, vous ne saurez rien. J’ai donné ma parole d’honneur de taire le nom, si on repoussait la demande.

Marcel alla chez son oncle. Il flairait la vérité ; mais