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faut encore quelques écus pour déménager, je ne les lui refuserai pas. Va, et qu’elle ne me rompe plus la tête de ses peines ; mais, avant tout, porte à la comtesse mon offre, que je crois assez gracieuse, et ma promesse d’indemniser à souhait ses protégés.

Marcel, stupéfait mais charmé, porta ces bonnes nouvelles d’abord à madame Thierry, qui remercia la destinée, et faillit bénir son beau-frère pour sa volonté de la faire déménager au plus vite et à tout prix.

Madame d’Estrelle fut moins joyeuse ; elle avait revu l’aimable veuve, elle chérissait déjà son entretien, et puis elle eut des scrupules ; la munificence de M. Antoine lui parut une folie de parvenu qui l’humiliait.

— Il va croire, disait-elle, que j’ai manœuvré pour l’amener à ce sacrifice, et cela me répugne. Non, vrai, je n’accepterai que la moitié. J’aime bien mieux garder son estime et mon influence au profit des pauvres Thierry. Allez lui dire que je veux vingt mille livres seulement et la continuation du bail de votre belle-sœur.

— Mais ma belle-sœur désire beaucoup déménager, répondit Marcel. Songez donc qu’il y va pour elle d’une somme qui a de l’importance.

— Alors ne vous occupez pas en mon nom de ce qui la concerne, mais occupez-vous bien de ma dignité, dont je vous confie le soin.

Cette réponse, transmise à M. Antoine, amena une explosion qui étonna Marcel.