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riche à les aider sérieusement dans leur détresse.

— Alors de tout mon cœur, monsieur Thierry ; mais, si déjà je suis à même d’apprécier madame votre tante, que puis-je dire de votre cousin, que je ne connais pas ?

— N’importe, parlez-en de confiance. C’est un cœur d’or que mon Julien, un esprit de haute race, une âme au-dessus de sa condition ; c’est le meilleur des fils, le plus sûr des amis, le plus honnête des hommes et même le plus raisonnable des artistes. Dites tout cela, madame la comtesse, et, si jamais la vie de Julien donne le moindre démenti à vos paroles, chassez-moi d’auprès de vous et ne m’accordez plus jamais ni estime ni confiance.

Marcel parlait avec tant de feu, que Julie en fut frappée. Elle s’abstint de questions ; mais elle écouta, sans en perdre un mot, la suite de l’éloge, et Marcel entra dans des détails dont un cœur impitoyable eût seul pu n’être pas touché. Il raconta les soins de Julien pour sa mère, les souffrances qu’à son insu il s’imposait, jusqu’à se priver de nourriture pour qu’elle n’en fût pas privée. Ici, Marcel fit comme madame Thierry, il mentit sans le savoir. Julien ne mangeait plus parce qu’il était amoureux, et Marcel, qui ne s’en doutait guère, croyait avoir deviné la cause de cette involontaire austérité. Mais Julien était capable de faire bien plus pour sa mère que de restreindre son appétit. Il eût donné pour elle jusqu’à la dernière goutte de son sang ; donc, en ne disant pas la vérité