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sait, dans les entr’actes, les honneurs de la capitale et du théâtre. Il lui montrait la loge du roi, le parterre, le lustre ; il lui expliquait même la pièce et l’importance de chaque personnage.

— Vous allez voir une belle pièce, lui disait-il avant le lever du rideau. Vous ne comprendrez peut-être pas bien, parce que c’est en vers. Moi, je l’ai lue avec mon parrain Julien ; c’est une pièce qu’il aime beaucoup, et il m’a tout expliqué comme si c’était en prose. Quand vous ne comprendrez pas, mademoiselle, il faudra me demander.

— Tu bavardes comme une pie, lui dit sa mère. Est-ce que tu crois que madame ne connaît pas Corneille mieux que toi ?

— Ah ! c’est possible ; mais elle n’est peut-être pas aussi savante que mon parrain !

— Madame se soucie bien de la science de ton parrain ! Tu t’imagines que tout le monde le connaît !

— Ah bien ! si vous ne le connaissez pas, dit Juliot en s’adressant à madame d’Estrelle, je vais vous le montrer. Il n’est pas loin d’ici, allez !

— Comment ! dit Marcel contrarié, il est là ? tu le vois ?

— Oui, je le vois depuis un bon bout de temps. Il aime tant ça, Polyeucte ! Il l’a vu jouer plus de dix fois, je suis sûr ! Tenez, regardez au parterre, la troisième banquette devant nous. Il nous tourne le dos ; mais je le reconnais bien, pardi ! Il a son habit de prunelle noire et son chapeau à ganses.