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portait… Pourvu qu’il pût la montrer à son austère compagnie du lendemain, à Marcel, à Julien, à madame Thierry surtout, et à tous ses jardiniers, appuyée sur son bras ou assise à sa table, et lui témoignant une amitié filiale sans s’inquiéter du qu’en dira-t-on, il lui semblait qu’il serait parfaitement heureux ainsi.

— Et si je ne suis pas encore content, se disait-il parlant de lui-même à lui-même avec une tendresse sans bornes, je serai toujours à temps de l’apprivoiser et de l’amener au mariage, au sacrifice de son titre pour le nom de Thierry aîné, qui alors vaudra bien celui de monsieur mon frère, Thierry le peintre ! — Puisque vous êtes si gentille, dit-il à Julie, moi, je vais être gentil. Je vais faire tout ce que vous souhaitez. Chargez-vous, par exemple, d’inviter pour moi madame André Thierry, et dites-lui que, si, par sa faute, vous manquiez au rendez-vous de demain, je ne le lui pardonnerais de ma vie.

— Je me charge d’elle, mon voisin. À demain, soyez tranquille !

— Ça vous ennuierait de dire mon ami ? reprit Antoine, dont la langue se déliait sous le coup du bien-être intérieur.

— Ça ne m’ennuie pas du tout, répondit Julie en riant ; mais je vous dirai ce mot-là demain, si vous tenez parole.

— Vous me le direz… publiquement ?

— Publiquement, et de tout mon cœur.

Le vieillard s’en alla en trébuchant comme un