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faire à André dans l’esprit de son père par mes abominables mensonges. »

Il y travailla sur-le-champ, et n’eut pas de peine à faire oublier au marquis les prétendues menaces qui l’avaient effrayé. Le hobereau était si content de ressaisir à la fois ses terres et son argent qu’il était dans les meilleures dispositions envers tout le monde ; il se grisa complètement à souper, devint tendre et paternel, et prétendit qu’André était ce qu’il avait de plus cher au monde.

— Après votre argent, papa ! lui répondit étourdiment Joseph, qui, par dépit, s’était grisé aussi.

— Qu’est-ce que tu dis ? s’écria le marquis ; veux-tu que je te casse une bouteille sur la tête pour t’apprendre à parler ?

La querelle n’alla pas plus loin ; le marquis s’endormit, et Joseph se sentait une mauvaise humeur inquiète et agissante qui lui donnait envie d’être dehors et de faire galoper François à bride abattue. Avant de le laisser partir, M. de Morand lui fit promettre de revenir le lendemain avec André et Geneviève.

Le lendemain de bonne heure, Joseph, reposé et dégrisé, alla trouver ses amis. Il avait bien envie de les gronder ; mais la candeur et la noblesse de Geneviève, au milieu de ses perfidies obligeantes, le forçaient au silence. Ils montèrent tous trois en patache, et arrivèrent au château de Morand sans s’être dit un mot durant la route. André était triste,