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de douleur. « Hélas ! se disait-elle alors, c’était bien la peine de m’apprendre ce qu’il faut savoir pour sentir le bonheur ! »

Elle pleurait depuis une heure à sa fenêtre lorsqu’elle vit venir Henriette. Elle eut envie de se renfermer et de ne pas la recevoir ; mais il y avait longtemps qu’elle évitait son amie, elle craignit de l’offenser ou de l’affliger ; et, se hâtant d’essuyer ses larmes, elle se résigna à cette visite.

Mais au lieu de venir l’embrasser comme de coutume, Henriette entra d’un air froid et sec, et tira brusquement une chaise, sur laquelle elle se posa avec roideur. « Ma chère, lui dit-elle après un instant de silence consacré à préparer sa harangue et son maintien, je viens te dire une chose. »

Puis elle s’arrêta pour voir l’effet de ce début.

— Parle, ma chère, répondit la patiente Geneviève.

— Je viens te dire, reprit Henriette en s’animant peu à peu malgré elle, que je ne suis pas contente de toi : ta conduite n’est pas celle d’une amie. Je ne te parle pas de tes devoirs envers la société : tu foules aux pieds tous les principes ; mais je me plains de ton ingratitude envers moi, qui me suis employée à te servir et à te rendre heureuse. Sans moi tu n’aurais jamais eu l’esprit de décider André à t’épouser ; et si tu deviens jamais madame la marquise, tu pourras bien dire que tu le dois à mon amitié plus qu’à ta prudence. Tout ce que je te