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lui fit brusquement tourner la tête, et il vit à trois pas de lui une vague forme de quadrupède dont la longue face pâle semblait l’observer attentivement. Le premier mouvement de Joseph fut de lever le manche de son fouet pour frapper l’animal redoutable ; mais, à sa grande confusion, il vit une jeune pouliche blanche, à demi sauvage, qui était venue là pour paître l’herbe autour des tombeaux, et qui s’enfuit épouvantée en traînant ses enferges sur les dalles de la chapelle.

Joseph, tout honteux de sa terreur, pénétra au fond de la nef ; une croix de bois marquait la place où avait été l’autel. Geneviève était agenouillée devant cette croix ; elle avait roulé son fichu de mousseline blanche comme un voile autour de sa tête, penchée dans l’immobilité du recueillement. Un cerveau plus exalté que celui de Joseph l’aurait prise pour une ombre. Étonné de trouver Geneviève dans une attitude si calme, et ne comprenant pas l’émotion que cette femme agenouillée la nuit au milieu des ruines lui causait à lui-même, le bon campagnard eut comme un sentiment de respect qui le fit hésiter à troubler cette sainte prière ; mais, au bruit des pas de Joseph, Geneviève se retourna, et, se levant à demi, le questionna d’un air inquiet.

Il eut presque envie de la tromper et de lui cacher la vérité ; mais elle interpréta son silence et s’écria en joignant les mains :

— Au nom du ciel, ne me faites pas languir.., s’il